
« Nouveau quartier ou pas, les gens ont donc compris que j’étais un extraterrestre. » (P. 84)
César, le narrateur est élève à Science Po, il veut préparer l’ENA…
Il quitte subitement le cours car il a mal au bras ! Et si c’était un infarctus..?
Le pharmacien qu’il consulte se déclare incompétent….Quant au cardiologue, ce dernier ne le prend pas au sérieux et se moque de lui.
César a été élevé et vit dans un monde exclusivement féminin dans lequel se retrouvent, sa mère, sa grand-mère, ses tantes et a peu, voire pas du tout de contact avec ses congénères, les gamins de son âge, ni non plus avec le monde masculin.
Il n’a aucun point commun avec eux et n’éprouve aucun plaisir à les rencontrer
César – c’est son prénom-comme celui de l’auteur, décide donc de partir aux Etats-Unis où vit sa grand-mère, une grand mère qui finance toute la famille, et qui a pour amies d’autres vieilles aux cheveux et aux porte-monnaie argentés
Il a un comportement, qui me semble-t-il se rapproche de l’autisme – je ne suis pas spécialiste – mais il prend plaisir à dessiner des villes et des réseaux de train et parvient à apprendre par cœur des horaires de trains, et connait toutes les routes de France, par cœur.
Il est solitaire et n’éprouve aucun plaisir à rencontrer des gamins de son âge
Le livre de chevet de sa mère est « Comprendre l’autisme »…..
Son père, quant à lui s’intéresse peu à lui.
Pas facile pour César d’approcher les filles…Elles l’intriguent, l’attirent aussi, mais difficiles – en ce qui le concerne – à aborder…Perdre son pucelage est l’une des préoccupations de César…bien embarrassé tant dans l’approche des filles de son âge, que dans la réalisation de cet objectif.
Tout ce qui est nouveau est source de perturbation, Y compris les repas : ses besoins alimentaires sont donc limités au strict minimum : une boite de sardines..
Ce livre autobiographique m’a dérouté, intrigué, et passionné. Sans aucun doute parce qu’il fait pénétrer le lecteur dans l’âme et l’esprit d’un jeune homme qui met sur le papier son caractère, ses lubies, ses amours, ses craintes et peurs, sa famille. Sa différence !
Ce n’est pas un roman, ce n’est pas une fiction, c’est l’âme, l’esprit, les angoisses, les souhaits réels d’un jeune homme mis sur le papier, pour nous permettre de tenter de comprendre la spécificité de son comportement . Sa différence !
Cette mise à nu m’a passionné et beaucoup intrigué, car non conventionnelle. Elle m’a permis d’approcher intellectuellement cette « différence »
Décidément, je n’étais pas fait – et je comprends pourquoi – pour traiter, pour aborder le fonctionnement des cerveaux humains.
Tout ce qui est « psy » ne m’est pas familier…j’en fais presque un rejet
Ce n’est pas pour autant que je dois m’en désintéresser, surtout quand un jeune homme jette sur le papier de façon si précise, ses angoisses, son comportement, son mode de réflexion et d’action…sa différence…N’est-ce pas pour nous tenter de partager avec ses lecteurs ?
Alors oui, c’est une bonne chose, à mon avis de tenter de comprendre cette différence…. grâce à ce texte autobiographique….même si tout n’est pas évident ni aisé à comprendre et parfois un peu loufoque!
Merci à lui
Editeur NRF-Gallimard – 2022 – 227 pages
Lien vers la presentation de César Morgiewicz
Quelques lignes
« Parfois ça me décourage que les seules personnes à qui je plaise soient les femmes du quatrième âge. » (P.23)
« Là où ma mère a fait fort , en revanche, c’est qu’elle a réussi à tromper mon père avec un homme encore plus vieux que lui. » (P. 35)
« Quand j’étais petit j’essayais d’expliquer aux gens que mes parents étaient divorcés mais que j’habitais avec mon père et ma belle-mère chez la mère de ma mère..’. » (P. 36)
« La famille recomposée, il faut reconnaître, ça vous apprend bien la cohabitation polie. » (P. 48)
« Au moins, je ne peux pas dire que ce soit ce confinement qui me perturbe. je trouve ça au contraire très agréable. C’est comme si le monde entier adoptait mon mode de vie, pour une fois j’ai l’impression d’avoir une longueur d’avance. les gens se lamentant que ça fait trois semaines qu’ils ne sont pas allés à une soirée et j’ai envie de leur dire tu sais moi je suis allé à cinq soirées en vingt-trois ans et je tiens le coup. Mais je sais que ça ne va pas durer. Dès que ça va reprendre ils iront tous courir dans les bars et sur Tinder et moi je resterai en arrière, tout seul dans ma vie normale. » (P. 52-3)
« j’étais donc forcé d’aller dans la cour exposer ma solitude. » (P. 83)
« Nouveau quartier ou pas, les gens ont donc compris que j’étais un extraterrestre. » (P. 84)
« Je n’avançais pas trop, à la bibli, je restais des heures à regarder en l’air. Je rêvais que j’étais historien et que je passais ma vie à travailler dans des bibliothèques silencieuses, et pendant ce temps je ne travaillais pas .. Malgré tout je continuais à y aller parce que ça donnait un cadre à mes journées. Il ne fallait jamais sortir du cadre, si j’en sortais je savais que c’était l’angoisse qui m’attendais. » (p. 147)
« Au bout d’un mois tout cela est retombé. L’espérance de vie moyenne de mes lubies n’a pas été dépassée. Et c’est alors que j’ai franchi le pas, et je me suis tourné vers la Russie. » (P. 153)
« Dix-neuf ans, toujours puceau…Comme je ne tenais pas à entrer dans le livre des records je me suis décidé à agir. » (P. 161)

