
« J’étais une étrangère, dans un pays étranger, et c’est ce qui me valait d’avoir rendez-vous une fois par semaine dans le bureau surchauffé de Marie-Ange. » (P. 13)
Leila est arrivée en France il y a bien longtemps. Elle vit dans un hôtel minable, géré par un marchand de sommeil, un « hôtel » sur le point d’être évacué, car il menace de s’effondrer….un hôtel social dans lequel sont logés les étrangers en attente de naturalisation, un hôtel dans lequel règnent les disputes.
Elle espère, depuis bien des années, sa naturalisation et chaque mois rencontre Marie Ange, par laquelle arrivera un jour ou l’autre cette naturalisation espérée.
Leila vit seule et a quelques amis, parmi lesquels Momo, qui tient un manège, Momo, menacé d’expulsion et de fermeture par la Mairie de l’arrondissement, car il une barbe bien trop fournie, qu’il refuse de couper, une barbe qui le fait passer pour un intégriste musulman…et dans sa cabine se trouve un Coran.
Alors Leila vit de petits boulots, nettoie les toilettes d’un restaurant et attend, attend…
Elle n’est pas la seule, tant d’autres sont dans la même situation. « L’espoir fait vivre » dit-on !
Certaines ne peuvent vendre que leur corps pour quelques €uros…et quelques minutes !
Cette attente, ce texte est un coup de poing adressé à la France…un coup de poing dénonçant l’orgueil de la France, de certains Français, des services sociaux….cette France envisagée par certains uniquement comme un chemin d’accès vers Calais, vers l’Angleterre.
Une France dans laquelle d’autres veulent vivre, travailler et s’intégrer …une France perçue souvent par le lecteur comme un pays sans coeur….Un coup de poing !
Un texte qui nous renvoie à bien plus d’humanité et d’hospitalité. « On n’oblige personne à venir » diront certains, d’autres au contraire seront bien heureux de faire travailler ces immigrés sur des postes difficiles à tenir, refusés par bien d’autres français de souche….des emplois indispensables
« Je pense que la plupart des gens passent leur vie entière sans jamais rencontrer leur coeur, à croire que leur coeur n’est rien d’autre qu’un organe musculaire creux, composé de deux pompes situées côte à côte, l’une qui sert à récupérer le sang dans tout le corps et l’autre qui sert à envoyer le sang récupéré dans l’organe qui entoure le coeur, les poumons. » (P. 110)
Un texte utile à méditer !
Allary Editions – 2022 – 300 pages
Lien vers la présentation de Leïla Bouherrafa
Quelques lignes
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« Avec mon prénom, ma foi était la seule chose que j’avais pu emporter de ma vie d’avant, et j’avais peur de ce qu’il pourrait advenir si elle disparaissait. » (P. 121)
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« Il y a des choses, si on ne les fait pas immédiatement, au fond, on sait qu’on ne les fera jamais. Si je devais n’en citer que quelques-unes, je dirais aimer, pardonner, espérer » (P. 131)
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« …je ne voyais aucun point commun entre tous les français que je connaissais » (P. 135-6)
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« Ca m’a sauté aux yeux que la france était un paonUn pays trop fier qui avait un avis sur tout.Sur tout sauf, bien entendu, sa propre médiocrité.La France était un paonUn drôle de paon, beau, sublime et majestueux, qui se pavane, persuadé qu’il est le plus beau, le plus sublime et majestueux de tous les paons et que tous les autres paons du monde ne peuvent avoir ni plus belles plumes, ni meilleur coeur, ni plus grande âme. » (P. 150)
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« Je pense que, dans la vie,il y a des choses qui ne devraient jamais avoir à se réclamer. Si je ne devais en citer que quelques-unes, je dirais l’amour, un corps, un logement. » (P. 170)
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« De toute façon, ce monde où tout irait bien, je ne l’appellerais pas «monde», car je ne voudrais pas parler de lui au masculin. Je l’appellerais Terre, Planète, Dune ou Création. Et dans ce monde que je nommerais au féminin, on ne pourrait être dévasté par rien. Á part, peut-être, l’amour, la liberté et la passion. » (P. 237)

