
Un jour au hasard d’une promenade de quelques minutes dans le parc de Westminster, la Reine, car c’est bien d’elle qu’il s’agit, va au devant du bibliobus qui fait sa tournée régulière et croise un jeune homme que le protocole n’aurait jamais mis sur son chemin car il travaille dans les cuisines et fait la vaisselle. Elle engage la conversation et lui demande de lui proposer un livre….
Elle a été ferrée. Elle vient de découvrir la lecture, le plaisir de lire, le bonheur de rencontrer un lecteur et d’échanger des conseils de lecture, celui qui se trouve dans cet oubli du monde extérieur…
Elle retrouvera le gamin…
Voilà les toutes premières pages de cette fable, de cette facétie
Tout le château en est bousculé, tout le protocole est oublié…ses obligations deviennent parfois secondaires, ses chiens adorés ont moins de caresses…
Au fil du temps ses lectures deviennent plus complexes
Ce plaisir de la lecture, ce besoin d’échanger fera alors partie du protocole, des points abordés lors d’une rencontre avec des ambassadeurs…
Un plaisir bien différent de celui de l’écriture.
Queen E..n’est finalement là que pour incarner tout lecteur, toute lectrice en général.
Chacun retrouvera dans l’une ou l’autre des considérations ou des conversations de la Reine, de l’auteur, l’une ou l’autre de ses motivations personnelles, l’une ou l’autre de ses manies ou plaisirs de lecteur…et aussi les difficultés rencontrées lors de l’écriture.
L’humour, sans doute un peu trop british est présent, les conversations sont souvent décalées et deviennent amusantes et peu crédibles quand on les imagine dans la bouche de cette reine si éloignée dans la vie du commun des mortels que nous sommes…
Vite lu, mais je n’ai pas eu entre les mains, le livre qui bouscule, qui dérange, qui fait tout oublier pour un temps, celui qu’on referme avec regret
Éditeur : Denoël Folio – Traduction : Pierre Ménard – 2010 – 122 pages
Qui est Alan Bennett
Quelques lignes
- « Une fois que je commence un livre, je le termine. C’est ainsi qu’on était élevé jadis : qu’il s’agisse des livres, des tartines beurrées ou de la purée de pommes de terre, il fallait toujours finir ce qu’on avait dans son assiette. » (P. 17)
- « Les livres sont tout sauf un passe-temps. ils sont là pour vous parler d’autres vies, d’autres mondes. » (P. 34)
« Voyez-vous, Gerald, lorsque les gens s’agenouillent devant vous, vous disposez d’une vue imprenable sur le sommet de leur crâne : et sous cet angle, même les êtres les plus antipathiques finissent par avoir quelque chose de touchant, ne serait-ce qu’en raison d’une calvitie naissante ou d’une coupe de cheveux hasardeuse. » (P. 83)
« ….je me demande si vous partagez l’opinion selon laquelle la lecture attendrit ceux qui la pratiquent, alors que l’écriture produit l’effet inverse. Il faut s’endurcir pour écrire, vous ne croyez pas? » (P. 108)
« On cherche dans un livre la confirmation de ses propres convictions. Chaque livre, à tout prendre, porte en lui un autre livre. » (P. 117)