« Route One » – Michel Moutot

« Il a fallu bâtir trente deux ponts, faire sauter des pans de montagne et s’abîmer dans l’océan des dizaines de machines, aplanir des collines, creuser défilés et tunnels pour mettre ce point final à la conquête de l’Ouest. » (P. 313)

Il a fallu également vaincre de nombreuses réticences, trouver des hommes compétents pour organiser ce chantier, d’autres pour faire face à des hommes armés osant tout pour que ce chantier contourne leurs terres….et ne découvre pas leurs secrets ou leur turpitudes…

Un chantier réalisé dans les années 30.

Les engins hydrauliques puissants que nous connaissons aujourd’hui n’existaient pas, les chevaux, les ânes étaient de la partie pour tracter les bennes, et les engins lourds de terrassement étaient des Bucyrus-Erie à chenilles…et les morts sur les chantiers devaient être effacés, sans scrupule. Tous pouvaient travailler, mais malgré cela on manquait de main d’oeuvre, alors on faisait appel aux prisonniers.

Beau chantier ou plutôt beaux chantiers.

La Route One, est l’un de ces chantiers de titans pensé et réalisé dans les années 30. Mais ce n’est pas le seul chantier mentionné par Michel Moutot…il évoque dans la première partie du livre le chantier de construction du barrage de Boulder sur le Colorado, chantier également au superlatif, que Wilbur Tremblay devra quitter, sans ménagement avant de travailler sur le chantier de la Route One….mais je ne vais pas tout vous raconter…..

Travailler et se tuer au travail….tout ce qu’on attend des hommes recrutés!

Laissez l’auteur vous emporter, vous prendre par la main, vous indigner et vous émouvoir.

N’oubliez-pas qu’il est journaliste et qu’il ne ne manquera pas une occasion pour rappeler aux lecteurs, toutes les actualités de ces années, la prohibition, la ruée vers l’or au moindre bruit, les cracks bancaires, la pauvreté de certains chassés de chez-eux par les faillites des banques et l’opulence de bien d’autres, les crimes.

Mais que serait cette Amérique sans la Maffia et ses trafics, sans l’ingéniosité de ses hommes, sans le vice de bien d’autres, sans la violence, sans l’inventivité américaine, sans ses mormons, sans le beau et la puissance d’un côté et les turpitudes de l’autre.

C’est le troisième livre de Michel Moutot que je lis, et que j’ai eu le plaisir de croiser un jour…. Chacun de ses textes m’a apporté toujours beaucoup de plaisir.

Il m’en reste d’autres à découvrir. Alors à bientôt

Merci à Babelio et à Masse Critique pour cette découverte

Éditions du Seuil – 2022 – 320 pages


Lien vers la présentation de Michel Moutot


Quelques lignes

  • « La route One arrive de Los Angeles, d’où elle est partie il y a plusieurs années , pour rallier San Francisco, dans le cadre des grands projets du président Roosevelt. pour les Californiens des villes, c’est un symbole de progrès, le point final de la conquête de l’Ouest; les ouvriers au chômage depuis le début de la crise de 29 et tout juste embauchés sur le chantier y voient la fin de leur cauchemar, un retour au travail, la satisfaction d’empoigner un outil; les fermiers de la région l’opportunité d’exporter plus facilement récolte et bétail, l’armée l’ouverture d’une voie nécessaire à la protection de la côte, les politiques une réalisation prestigieuse à mettre à leur actif. Hyrum Rock une menace mortelle » (P. 40)
  • « Le gouvernement fédéral va bien devoir intervenir, il ne peut pas laisser d’effondrer la système bancaire du pays. Sans banque, pas d’entreprises, pas d’économie, pas de travail. le Président Hoover devra bien d’adresser à la nation…; » (P. 90)
  • « Après le crépuscule, les habitants blancs de San Francisco ne s’aventurent pas dans les ruelles puantes de Chinatown, où cochons à demi sauvages, enfants en haillons, mendiants sans âge et membres de gangs adolescents se côtoient, se chamaillent ou s’ignorent dans un tumulte incessant. […] Masures en bois, fenêtres de papier, morceaux de voile de navire en guise de toits, ordures et eaux usées jetées dans dans les ruelles, prostituées adolescentes devant les portes de bordels insalubres, lames de sabres et de couteaux brillant dans la pénombre, vapeur des laveries, notes de flûtes ou de cithare, odeurs piquantes des restaurants de rue. » (P. 95)
  • « C’est la deuxième pelle à vapeur qu’on perd, en plus des trois camions et de je ne sais plus combien d’ânes, Ça commence à faire beaucoup. Et avec le morceau de montagne qui vient de descendre, on n’est pas près de passer ce cap. Même le sentier a disparu. il va falloir bâtir des structures de soutènement. Allez me chercher le géomètre, il faut qu’on refasse les calculs.(P. 159)
  • « Et là ils massacrent la montagne pour tracer à coups de dynamite une route le long de la côte, pour attirer les touristes et les promoteurs. Je ne l’ai jamais vu, ce Mormon, mais à sa place je ne serais pas ravi non plus de voir arriver les bulldozers.. » (P. 183)

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