« Effondrement…..c’était pour demain ? » – Gabriel Salerno

« ….si tout le monde vivait comme un Français, il faudrait 2,73 planètes. Il en faudrait 2.85 si tout le monde vivait comme un Suisse, 4.97 si tout le monde vivait comme un Américain et 0.64 si tout le monde vivait comme un Éthiopien » (P. 42)

François Mauriac avait écrit: « La lecture, une porte ouverte sur un monde enchanté »…n’espérez pas cet enchantement de la part de cet ouvrage….Non, apprétez-vous à recevoir un uppercut qui devrait, théoriquement, réveiller chacun de nous, lecteurs, et chacun de nos dirigeants tous pays confondus ou presque. Mais combien de ceux-ci liront ce livre? Et sont-ils prêts à vraiment mettre les mains dans le cambouis ? 

Yuval Noah Harari a tenté de sensibiliser notre monde, ses écrits parus en 2011 n’ont pas encore alerté suffisamment de chefs d’Etats… Jared Diamond avait quant à lui publié « Effondrement » en 2007 en prenant l’exemple de l’Île de Pâques…ces deux auteurs m’ont bigrement dérangé et les dirigeants de notre monde ont ignoré leurs écrits, leurs alarmes

Ce titre de Gabriel Salerno n’est certainement pas une lecture détente, mais plutôt une lecture concue pour éveiller chaque lecteur, chaque dirigeant – mais liront-ils ce texte – sur les dangers que chacun de nous, sauf un Ethiopien fait courir au monde, à ses enfants…

Babelio avait proposé ce titre lors de cette dernière opération « Masse critique ». Je l’avais sélectionné du fait de cette angoisse qui est  la mienne, de plus en plus souvent je l’avoue, même si je suis, du fait de mon âge, peu concerné par les conséquences de cette question.  Par flemme, il m’arrive de prendre, trop souvent, je le confesse, ma voiture . Je me console en me disant que je ne suis pas le seul . Mais de plus en plus je privilégie le vélo, malgré les dangers que je perçois pour ma sécurité.

Gabriel Salerno nous propose une réflexion profonde quant à nos comportements, une réflexion mais tout d’abord un rappel historique que jamais nous eûmes à connaître lors de notre scolarité.

Mais ce n’était pas encore un problème lors de la mienne dans les années 55-70. Pourquoi les civilisations comme celle des Romains, des Mayas, des Égyptiens, du Proche-Orient, ne sont-elles pas arrivées jusqu’à nous ? Pourquoi les cités, royaumes et empires du Proche-Orient prospères à l’âge du bronze sont-ils tombés dans l’oubli? Que reste-il du monde romain, du monde Maya ?….des pierres, essentiellement.

De ces civilisations nous ne connaissons que ces cités abandonnées, ces cités de pierre prouvant, si besoin était, l’ingéniosité, la compétence et l’art de ces hommes, de ces civilisations, et l’auteur en rajoute en développant des informations, fondées sur des écrits, sur les causes d’effondrement de ces civilisations. Rares à mon avis seront les lecteurs qui ne seront pas surpris de cette dévouverte d’un passé méconnu de la plupart d’entre nous, peu abordé lors de notre scolarité.

Civilisations et peuples dont j’ai découvert l’existence! Oui, c’est un rappel, ou plutôt une découverte de textes, de civilisations, de pans de notre histoire du monde qui ne furent jamais pour certains, ne serait-ce qu’évoqués lors de ma scolarité. Je suis persuadé que nombreux seront les lecteurs qui comme moi feront des découvertes…Oui ces civilisations puissantes, instruites, compétentes, même si elles n’avaient pas inventé le moteur à explosion, ont disparu…oubliées, effacées, rayées de la carte, ne laissant que des pierres. Belles au demeurant.

Alors pourquoi notre monde actuel, celui dans lequel nous vivons serait-il voué à durer une éternité? Un monde qui épuise notre planète et ses ressources, un monde qui a détruit de nombreuses espèces animales, …oui pourquoi ce monde pourrait-il perdurer, des années, des siècles encore?

Pourquoi? Inquiétudes quand on découvre que ces sociétés se sont effondrées du fait de pénuries des forces de travail à la suite de famines, du fait  d’inégalités sociales ou du fait d’une pénurie de ressources naturelles…

Les signes d’essoufflement sont visibles; il faut être bien sots pour les ignorer. nous puisons bien trop de matières premières, produits pétroliers, minéraux dans la terre, pour que ces ressources limitées puissent encore durer des siècles, des millénaires. Les sécheresses se renouvellent, de même que les tempêtes ou cataclismes..L’énergie se raréfie…il faut de plus en plus de cette énergie chère pour extraire de plus en plus profondément des minéraux ou d’autres sources d’énergie.

Spontanément le pétrole nous vient à l’esprit…Nos bagnoles sont essentielles, mais c’est aussi le sable…saviez-vous que « la production annuelle de béton se chiffre en dizaines de milliards de tonnes, soit suffisamment pour construire un mur de 27 mètres de haut sur 27m de large le long de l’équateur. » (P. 140) un sable de plus difficile à trouver ! Le sable des déserts est impropre à la fabrication de béton !

Et ce ne sont que quelques exemple parmi d’autres.

Quel monde laissons-nous à nos enfants et petits-enfants? 

Oui, les découvertes d’informations se succèdent, les claques aussi, claque après claque. Certes, chacun de nous peut, à son petit niveau faire attention  ce qu’il achète, à son empreinte carbonne…Mais cette lecture m’a fortement perturbé, m’a fait prendre encore plus conscience du mur vers lequel nous fonçons, tête baissée. Notre seul indicateur pour notre bien-être est le taux de croissance promu par tous les politiques…une hérésie selon l’auteur…un indicateur qui est devenu le linceul de notre civilisation..Le mur que nous laissons à nos enfants et petits-enfants contre lequel leur époque s’y fracassera sans doute. 

Un texte au croisement de la philosophie, de l’histoire, de la prospective, de la politique, de l’économie….de la vie des générations futures, celle de nos enfants, et petits enfants

Un titre pour servir de fil conducteur à notre réflexion, et à nos actes, d’autant plus que nous vivons de plus en plus fréquemment ces alarmes que sont les ouragans, les tempêtes, les pressions migratoires…

« Au delà de la globalisation, c’est l’actuel système ultra-industriel et néo-libéral qui est sur le point de chuter, et parallèlement l’actuel modèle social et politique. » (P. 145)

Avis à la population !

Merci à Babelio et à Masse Critique pour cette lecture

Éditions d’en bas – 2021 – 170 pages


Lien vers la présentation de Gabriel Salerno


Quelques lignes

  • « L’effondrement est un terme aux contours imprécis, mais la mise en parallèle d’ouvrages généraux et d’études historiques permet d’y voir un peu plus clair. » (P. 119)
  • « Or, en raison de l’inertie du système-Terre […] nous savons d’ores et déjà que certaines conséquences de la dégradation des paramètres physiques et biologiques du système-terre et certaines contraintes sur notre devenir collectif ne pourront pas être évitées. » (P. 120)
  • « Pour rester dans l’image, la Terre ne serait alors pas recouverte de glaciers, mais de déserts. Dans un tel monde, la préoccupation est de savoir quel moyen de transport je privilégie pour les trajets pendulaires, la question est de savoir si on bannit ou non les pesticides de l’agriculture, la question est de savoir si on densifie ou non tel ou tel centre urbain, deviennent; on en conviendra absurdes. La vie ne pourrait pas se déployer de la même manière, de même que nos sociétés. » (P. 25)  
  • « On ne parle pas de la disparition de l’humanité, mais du déclin d’un modèle de société partagé à travers la planète. » (P. 36)
  • « Le déclin des cités, royaumes et empires du Proche-Orient à l’âge du bronze final est un évènement historique extrêmenet riche en enseignements quant à la notion d’effondrement. Nous avons vu que ces entités formaient un monde globalisé;$, certainement le premier et le plus complexe – hormis le nôtre-de l’histoire. Elles évoluaient au sein d’un économie globale et étaient fortement interconnectés, parfois seulement à travers la guerre, mais généralement aussi à travers des accords de paix, des relations diplomatiques, des jeux d’influence, des liens et traités commerciaux, des migtaions de population, des échanges culturels, et des mariages dynastiques. Pourtant stable et prospère pendant des siècles, ce monde globalisé s’est effondré en l’espace d’un siècle et demi environ. (P. 107-8)
  • « Pour employer une métaphore, l’humanité est à bord du Titanic et voit devant elle la partie émergée de l’iceberg. Bien qu’il reste une certaien distance entre le paquebot et l’iceberg, il est trop tard, en raison de l’inertie du navire, pour l’éviter. L’impact aura lieu. Néanmoins, pour rebondir sur ce que nous disions ci-dessus, il n’est pas trop tard pour infléchir la tajectoire du navire et ainsi rendre la collision la moins catastrophique possible. » (P. 126)
  • « En définitve, l’effondrement actuel signifie la fin du temps de l’exubérance, ainsi que très certainement la fin du système industriel et de l’hyperglobalisation du monde, comme ce fut le cas pour les Mayas et les civilisations du Proche-Orient anciene. La société de demain sera marquée d’une façon ou d’une autre, par un retour à la terre, une certaine sobriété, moins de complexité, un partage plus égalitaire des ressources et richesses, un ancrage local et des flux de matières et d’énergie beaucoup moins importants. » (P. 146)
     
  • « Cet ouvrage aura montré que, même si un certain retour à la normale est peu ou prou envisageable après la pandémie, nous sommes en réalité entrés , depuis pluisieurs décénnies maintenant, dans une dynamique de changeme,nts extrêmements profonds. Et face à ces changements, il n’y aura pas de retour à la normale. Chaque bouleversement subi est un rappel permanent des difficultés, de la fragilité et du carctère non durable de notre société.  » (P. 177)
  • « Car c’est une évidence, nous nous dirigeons vers la fin du temps de l’exubérance, très vraisemblablement vers la fin du système économique néolibéral mondialisé, et, qui sait vers la fin du capitalisme étant donné la nécessité croissante de partager des ressources devenant rares et non d’accumuler du capital et de richesses. Est en train de s’opérer, qu’on le veuille ou non , un changement d’époque et de civilisation. » (P. 181)

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