« Gloire tardive » – Arthur Schnitzler

Gloire tardiveDécouverte d’un auteur et d’un thème sur lequel je n’ai encore jamais rien lu, la hantise de tout auteur : la recherche du succès, la reconnaissance du public…
Édouard Saxberger est un vieux monsieur coulant des jours paisibles de petit fonctionnaire vivant seul. Il reçoit la visite d’une jeune homme qui a trouvé par hasard chez un bouquiniste un vieil ouvrage de poésie, « Promenades » qu’il a beaucoup aimé.

Ce jeune homme passionné souhaite présenter le vieil auteur aux membres de son cercle littéraire « Exaltations »..
Un livre sur la rencontre entre le vieux Monsieur qui n’a jamais connu le succès et un groupe de jeunes auteurs, pour leur part, en attente de succès, il est encensé, loué par ces jeunes, il connait la gloire, au moins locale.

Le vieil homme flatté par ces jeunes gens, « à part trompettes ces jeunes messieurs ne savent pas faire grand-chose », choyé par une actrice également en attente de célébrité découvre ce que le succès, un succès qu’il n’a jamais eu, il sort de chez lui, et participe assidument aux réunions, souvent d’auto-satisfaction, des jeunes auteurs qui se réunissent dans les café viennois 

Illusion de succès qui se transformera vite en interrogations sur ce succès…voire en dépression lorsqu’il entendra une remarque fort désobligeante…, lorsqu’il lira la presse
Vite lu et agréable, ce livre non publié du vivant de l’auteur, mais sauvé des autodafés nazi après le décès d’Arthur Schnitzler et l’annexion de l’Autriche, épingle la fatuité de ces milieux littéraires, la communication surfaite.
Malgré son âge, un livre intemporel. Le livre d’un monde cruel, celui des artistes, des auteurs, de ces soirées d’auto-satisfaction…dans lesquelles sont absents les lecteurs, ou les spectateurs..   
Merci à Babelio et à Albin Michel pour m’avoir permis de découvrir cet auteur

Je vais essayer de lire « Mort à Venise » de Thomas Mann…..dont le thème rappelerait selon Albin Michel « Gloire tardive »mais j’en ai tant d’autres à lire


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Extraits
  • « Était-il possible qu’une personne si jeune et qui lui était totalement étrangère le connut, lui et son livre oublié » (P. 10)
  • « C’est toujours la même chose. Au début on se contente du plaisir que l’on prend à créer et de l’approbation des rares personnes qui nous comprennent. Mais en cours de route quand on voit tout qui monte à côté de soi, tout ce qui se fait un nom, et même, accède à la célébrité, on en vient à se dire qu’il serait même bon d’être enfin écouté et reconnu à son tout. Mais à partir de là, gare aux déceptions ! La jalousie de ceux qui n’ont aucun talent, la superficialité et la malveillance des critiques et surtout l’effroyable indifférence de la multitude. On finit par se sentir las, las, las. On aurait encore beaucoup à dire mais personne ne veut écouter et on finit par oublier qu’on été soi-même l’un de ceux qui voyaient grand, qui avaient peut-être créé quelque chose de grand » (P. 13)
  • « Si l’on veut qu’une idée rencontre un quelconque écho, c’est aux personnes âgées qu’il faut la présenter. Les jeunes ne voient jamais qu’un rival dans chaque nouveau venu désireux de se faire connaître » (P.32)
  • « Il était des leurs ; il comprenait tout ce qu’ils disaient et face au monde, à y regarder de près il était encore de leur côté : il avait créé quelque chose et aspirait à la reconnaissance qui lui avait été refusée jusque là. Et voilà qu’il l’avait trouvée, du moins en partie, et en un temps où il avait pratiquement oublié qu’il la méritait » (P. 43)
  • Alors, que pensez-vous de notre tragédienne ? s ‘enquit-il ?
    C’est une personne très intéressante, répondit Saxberger sur un ton hésitant, presque interrogateur.
    Oui, dit Linsmann, il y a dix ans, elle avait même un peu de talent.
  • « Tu as fait don d’une œuvre d’art à la nation et la nation ne l’a pas prise en considération. Mais nous voulons que la nation sache enfin qui tu es et nous allons la forcer à nous écouter ! Nous en avons fait le serment sous le drapeau dont tu es porteur » (P. 54)
  • « L’allégresse de ces jeunes gens lui apparaissait comme l’accomplissement différé de maintes espérances dont il avait fiévreusement attendu la réalisation plusieurs décennies auparavant et qui s’étaient peu à peu diluées dans la grisaille de sa vie quotidienne » (P. 55)
  • « Et là dessus, l’impression d’avoir retrouvé la fraîcheur de sa jeunesse s’imposa avec une force telle qu’il finit par se dire à lui-même : non, il n’est jamais trop tard……Et il prenait plaisir aussi à parler de lui-même le plus simplement du monde, à parler des déceptions qu’il avait connues dans sa jeunesse, de son existence discrète, solitaire, de la succession des jours dans son modeste logement. » (P. 60)
  • « Au fond, c’était très simple et pas si triste que ça, pas plus triste en tout cas que le fait d’être  vieux, à peine plus triste que les trente années au cours desquelles pas un seul vers ne lui était venu à l’esprit. » (P. 82)
  • « Aussi longtemps qu’on est jeune, on peut éventuellement donner forme à pas mal de choses…et plus tard..plus tard, ça passe, on ne sait comment. » (P. 137)

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