« Seul dans Berlin » – Hans Fallada

Seul dans Berlin Un immeuble ordinaire d’une rue quelconque de Berlin pendant la guerre sert de cadre de départ à ce roman. Des personnages dont les destinées se croisent : un condensé sur quelques étages de ces allemands, des salauds, des alcooliques, des magouilleurs, une vielle femme juive dont le mari a disparu, des encartés au parti, des gamins des jeunesses hitlériennes, un vieux juge, des ouvriers, des coureurs de jupons, des parents dont les enfants sont des SS…. 

Une vie normale semble t-il.

Certains font la fête parce que la France est vaincue et un couple d’ouvriers habitant l’immeuble, des gens simples pleurent leur fils, dont ils viennent d’apprendre le décès, tué pendant la campagne de France.
Face à la lâcheté, au cynisme, face aux magouilleurs, face au racisme, ce couple va rester droit et intègre et  va déclarer « la guerre entre eux d’un coté, les pauvres et insignifiants petits ouvriers, qui à cause d’un mot pouvaient être éliminés pour toujours et de l’autre le Führer, le parti, ce monstrueux appareil avec tous ses pouvoirs et son éclat, et les trois quarts oui, les quatre cinquièmes même de tout le peuple allemand derrière eux ».
Une guerre perdue d’avance, on le pressent, même si on espère le contraire. Oh pas une guerre violente, pas de terrorisme, non des petites cartes déposées ça et là, pour critiquer le régime, Hitler, le nazisme.. la Gestapo en face…
Un couple qui sait rester droit jusqu’à la fin, qui par des actes insignifiants  qui ne changeront rien, fait face à ses devoirs contrairement à tous « ces tire-au-flan qui ne veulent pas travailler, tous des embusqués qui ne veulent pas aller au front, des hommes et des femmes qui sur certificat médical veulent s’arroger de la nourriture en plus grande quantité et de meilleure qualité. Tous des gens qui veulent se défiler devant leurs devoirs face à tous ces autres ».
Un pavé difficile parfois, mais un pavé qu’on ne regrettera pas d’avoir lu. Écrit en 1946 au lendemain de la guerre ce roman constitue un éclairage de l’intérieur sur cette période de l’histoire et sur ce pays . 
C’est avant tout un livre sur l’honneur et la droiture face à l’abjection, et selon Primo Levi, « l’un des plus beaux livres sur la résistance allemande antinazie ».

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Extraits 
  • « Nous devons faire comme le Führer : jeter de la poudre aux yeux des gens, faire comme si nous étions sympathiques, et puis par-derrière, quand personne ne ne doute de rien : ni vu ni connu » (P. 23)
  • « Ce ne sont pas des gens différents. ils sont un tout petit plus nombreux et les autres sont devenus un tout petit plus lâches, mais la justice est restée la même, et j’espère que nous vivrons tous les deux le moment de sa victoire » (P.107)
  • « Et à nouveau elle frissonna . Il y avait quelque chose de si funeste, de si sombre, de si résolu dans les paroles qu’Otto venait de prononcer. Elle comprit aussitôt qu’avec cette première phrase il avait déclaré la guerre, aujourd’hui et pour toujours, et elle sentit aussi obscurément ce que cela signifiait : la guerre entre eux d’un coté, les pauvres et insignifiants petits ouvriers, qui à cause d’un mot pouvaient être éliminés pour toujours et de l’autre le Führer, le parti, ce monstrueux appareil avec tous ses pouvoirs et son éclat, et les trois quarts oui, les quatre cinquièmes même de tout le peuple allemand derrière eux. Et tous les deux ici, dans cette petite pièce de la rue Jablonski, tous les deux tout seuls »  (P.201)
  • « Ils croyaient en ce qu’ils espéraient » (P. 235)
  • 45 patients dans la salle d’attente du médecin : « Tous des tire-au-flan qui ne veulent pas travailler, tous des embusqués qui ne veulent pas aller au front, des hommes et des femmes qui sur certificat médical veulent s’arroger de la nourriture en plus grande quantité et de meilleure qualité. Tous des gens qui veulent se défiler devant leurs devoirs.  » (P. 250) 
  •  « Vous travaillez pour un assassin, et vous livrez à cet assassin toujours de nouvelles proies. Vous le faites pour de l’argent, peut-être bien que vous ne croyez même pas en cet homme. Non, vous ne croyez pas en cet homme. Juste pour de l’argent….. »(P. 546)
  • « Est-ce que vous appelez cela être fou, que de vouloir rester convenable à n’importe queĺ prix? …..vous savez très bien que celui qui est ici derrière les barreaux est convenable et que vous qui êtes dehors vous n’êtes qu’une crapule et que le criminel est libre mais que l’homme convenable est condamné à mort. Vous n’êtes pas un avocat, ce n’est pas pour rien que je vous ai appelé avocat du tordu.. » (P. 690)
  • « Et que voulait-il faire ? Autant dire rien !… Quelque chose de dérisoire, d’insignifiant, tout à fait dans sa ligne ; quelque chose de calme, qui ne pourrait en rien troubler sa tranquilité. Il voulait écrire des cartes ! Des cartes postales, avec des appels contre le Führer et le Parti, contre la guerre, pour éclairer ses semblables. C’est tout… Et ces cartes, il ne comptait nullement les envoyer à des gens bien déterminés, ni les coller sur les murs comme des affiches. Non, il voulait simplement les déposer dans les escaliers des immeubles où il y avait beaucoup d’allées et venues, les abandonner là, sans savoir aucunement qui les ramasserait, ni si elles ne seraient pas aussitôt foulées aux pieds ou déchirées ».
  • « Peu importe qu’un seul combatte ou dix mille. Quand on se rend compte qu’il faut lutter, la question n’est pas de savoir si l’on trouvera quelqu’un à ses côtés ».

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