Une vieille femme islandaise atteinte de multiples cancers vit sur un lit d’hôpital dans un garage…..un début pas banal.Cette vieille femme sait que le « Fermier qui est là-haut va l’appeler ». Elle nous raconte quatre-vingt ans de vie! Nous sommes en 2009, une mamie qui de temps en temps est lumineuse, pleine de vivacité, d’humour décapant, iconoclaste, pleine de bon sens, et parfois, et même un peu trop souvent casse-pieds… elle radote, mais n’a pas perdu la mémoire, revient à plusieurs reprises sur les mêmes faits, nous embrouille quelquefois.
Une mamie qui connu une vie pas banale, petite fille du premier président islandais, fille du seul nazi islandais, engagé dans les Waffen SS. Une mamie parfois libidineuse dont de multiples hommes croisèrent sa vie, viols, amours de passage, 4 gosses, dont 3 garçons en 10 ans de trois pères. Elle a vécu plusieurs vies, a connu des événements majeurs, l’Islande sous domination danoise, la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne nazie, la création de la République d’Islande, l’exil en Amérique du Sud…
Une mamie qui a souvent une grande lucidité et le don de rire et de nous faire sourire, jaune parfois, y compris avec ses cancers, ses soucis divers liés à sa santé. Une mamie qui dissertera avec philosophie et humour sur les hommes, les femmes, la vieillesse, la maladie, l’amour, la vie de couple, les enfants, l’argent, le pouvoir, la Vie… Elle ne se plaint jamais. Elle vit dans ce garage, car ses fils ont vendu sa maison et gardé pour eux l’argent de la vente. Une mamie très branchée, son seul bonheur c’est son ordinateur, Internet et ses nombreux profils sur Facebook.
Une mamie exceptionnelle, dans tous les sens du terme, et unique dans son genre.
Elle connut mille vies qui refont surface par petits bouts dans des chapitres courts, de moins de cinq, six pages, des souvenirs de quelques minutes ou d’une période.
Des souvenirs qui arrivent sans aucun ordre, qui se chevauchent, s’entrecroisent, se suivent parfois…Heureusement l’auteur nous en précise la date, depuis son enfance dans les années 30 jusqu’à 2009, période du roman. Ses souvenirs de vie de gamine, de fille, de mère, de femme, amoureuse, déçue, un peu pute parfois et ses souvenirs de vies au cours desquelles elle observa ou participa à des faits historiques qu’elle nous fait partager, vie de son père SS, occupation de pays et débâcle, intronisation de son grand-père premier président islandais, indépendance de l’Islande…Grands événements entrecoupés du fait de la juxtaposition des chapitres par des événements personnels ou familiaux, des d’amours déçus, des viols, des enfants.
Un roman pas banal, très documenté sur certains points, qui m’a beaucoup appris sur l’Islande, un pays qui me fascine, qui m’a fait sourire, un roman qui m’a énervé parfois… mais une fin pas banale, un doigt explosive.
Qui est Hallgrimur Helgason
Quelques extraits
« Je vis ici, seule dans un garage, avec pour unique compagnie un ordinateur portable et une vieille grenade. Un vrai petit nid douillet. Mon lit est un lit d’hôpital ; je n’ai guère besoin d’autre mobilier, en dehors de toilettes, qu’il m’est toujours pénible de devoir utiliser «
»On passe sa vie à économiser pour ses vieux jours, mais lorsqu’ils arrivent enfin, on a cesser de rêver à la dépense, et ne subsiste que le plaisir de pisser au lit. »
« C’est là le problème clé de la vie de femme : nous souhaitons être regardées sans avoir à dire un mot et être écoutées sans être vues. »
« Ma jeunesse fut noyée d’îles. Des îles remplies de marins amarrant et de malins moutons. Des îles baignées de soleil et brillantes d’herbes folles, bordées de mer, frappées par quatre vents et pourtant, dans mon souvenir, paisibles par tous les temps. »
« J’étais indépendante, n’avais aucun scrupule et ne reculais devant rien, ni les dogmes, ni devant les hommes, ni devant les ragots. Je parcourus le monde et acceptât n’importe quel emploi, parvenant toujours à joindre les deux bouts. J’eus des enfants, en perdis un, mais ne laissait jamais les autres prendre le contrôle de ma vie. Je les emmenai avec moi, ou les laissai derrière, avançait sans jamais reculer, sans jamais laisser le mariage m’emprisonner, sans jamais me laisser mourir d’ennui – et ce fut là la plus grande difficulté que je rencontrai. »
« La vie nous avait séparé à la naissance de la guerre, et seule une centenaire avait le pouvoir de nous réunir : maman fit enfin un pas vers moi, et me prit dans ses bras pour la première fois depuis le mois de janvier 1941, plus de vingt ans auparavant. »
« Il faut dire que j’étais devenue belle à tomber, d’une vénusté sans vulgarité, contrairement à ces handicapées de la beauté comme dit Dora, qui crèvent les yeux des hommes de leurs talons aiguilles. »
« Dans le garage de simplicité prévaut. Ici, il y a tout ce dont j’ai besoin, puisque je n’ai besoin de rien. Juste de médicaments, de nourriture, et d’Internet. Ah oui, et mes cigarettes, sept par jour. »
« Nous les Islandais, portons un trésor en bouche, trésor qui nous a façonnés plus que toute autre chose. Au moins nous ne gaspillons pas les mots dans le superficiel. Le problème de la langue islandaise est qu’elle est bien trop grande pour une société si petite. J’ai lu sur Internet qu’elle contient six cent mille mots et plus de cinq millions de déclinaisons possibles. Elle est plus développée que le pays lui-même. »
« Ne laisse jamais ton cœur te diriger ni ton cerveau. Il te faut l’approbation des deux à la fois. »
« Comme sur toutes les îles, l’eau ne poussait pas sur les arbres et l’eau chaude était un privilège des jours de fête. L’odeur de transpiration de Gunna était son propre déodorant : elle était certains jours si intense qu’elle ne laissait pas la nouvelle sueur s’échapper. »
« Les guerres font du bien. Elles nous débarrassent des hommes. Pendant quelques années si on a de la chance, voire complètement si tout fonctionne. »
« Tous ces jeunes gens qui viennent désormais peupler les maisons de retraite ont eu la belle vie par rapport à nous autres, enfants de la crise, victimes de tragédies et famines, qui devions vendre notre âme pour sauver notre corps et vendre notre corps pour sauver notre âme. Tout ça pour voir notre trésor s’évaporer dans un corbillard. »
« J’avais eu tôt de l’antipathie pour tout ce qui concernait les dieux, les religions. C’est sans doute l’une des plus sombres farces que l’espèce humaine s’est créées, aller inventer ces modèles inhumains, géants et grotesques contre lesquels il faut se battre, ou auxquels on doit sans cesse se comparer : une source intarissable de malheur. Ne pouvons-nous pas nous contenter d’être humains ? On dit de nos héros qu’ils sont divins mais je réponds : le plus humain est le plus grand des hommes. »
Enfin tu t’es décidé à le lire ? Sylvia
Tu peux préciser que 80 pour cent du roman est pure vérité .
Cette mamie à bel et bien existé d’où une force encore plus grande de ce livre
Francis