« Histoire d’un allemand » – Sebastian Haffner

Histoire d'un AllemandUn livre témoignage sur la montée du nazisme, un livre écrit par un jeune allemand, futur avocat, qui décidera quelques années plus tard de quitter l’Allemagne pour aller vers la liberté, vers Paris et l’Angleterre 
L’auteur fait un rappel des faits historiques depuis l’armistice de 1918, en passant par la grande crise et l’inflation galopante, le gouvernement de Brüning qui limite la liberté de la presse, impose les désertions pour empêcher les exils, « une semi -dictature au nom de la démocratie pour empêcher la dictature véritable »…..tous ces événements sur lequel il s’appuie pour présenter la lente évolution de la mentalité des allemands, qui pour 55% d’entre eux, à l’occasion d’un vote, ne faisaient pas confiance au parti nazi en mars 1933….

Des nazis arrivant au pouvoir du fait de la trahison des représentant des partis majoritaires en mars 33. « Seule cette trahison explique le fait apparemment inexplicable qu’un grand peuple, qui ne se compose quand même pas exclusivement de poltrons, ait pu sombrer dans l’infamie sans résistance » dans  « Une Allemagne fondamentalement impropre à la démocratie »
Un regard et une analyse sans complaisance sur ses compatriotes : « L’aptitude de mon peuple à la vie privée et au bonheur individuel est plus faible que celle des autres peuples », « Le grand danger qui guette les allemands à toujours été et est encore le vide et l’ennui, excepté peut être dans quelques régions marginales comme la Bavière et la Rhénanie, où l’on trouve une trace de romantisme et d’humour méridionaux ».
Un ouvrage indispensable pour comprendre le basculement du peuple allemand vers le nazisme : « On avait cru en Saint Marx, il n’avait pas secouru ses fidèles. Saint Hitler était manifestement plus puissant. Brisons donc les statues de Saint Marx placées sur les autels pour consacrer ceux- ci à Saint Hitler. Apprenons à prier : »C’est la faute au juifs » au lieu de « C’est la faute au capitalisme ». Peut-être est-ce là notre salut. »
Un texte découvert dans les archives de l’auteur après 1999, date de son décès. Une analyse clairvoyante des dangers que fera courir ce régime, des suites possibles… . On en arrive à se demander si l’auteur n’a pas modifié son manuscrit original après la guerre….Mais une analyse scientifique a confirmé que le manuscrit retrouvé en 1999, n’a jamais été corrigé ou remanié par l’auteur après la guerre…
Après ce régime, tout le monde a dit « Plus jamais ça », mais on en arrive à se poser des questions…. que peut faire un peuple désespéré, humilié!!
Des remarques qui conservent toute leur actualité« Les exilés sont une charge pour n’importe quel pays, et il n’est pas agréable de se sentir à charge. Ce n’est pas du tout la même chose d’arriver dans un pays  comme une sorte d’ambassadeur, comme quelqu’un qui a quelque chose à faire et à offrir, ou comme un vaincu qui cherche un asile. Pas la même chose du tout. »
 

Une leçon d’histoire à méditer 



Quelques extraits
  • « L’impact et les conséquences de cette expérience ne sont pas moindres du fait que ceux qui la vécurent étaient des enfants ou des jeunes enfants. Bien au contraire! L’âme collective et l’âme enfantine réagissent de façon fort semblables. Les idées avec lesquelles on nourrit et ébranle les masses sont puériles à n’y pas croire. Pour devenir une force historique qui mette les masses en mouvement, une idée doit être simplifiée jusqu’à devenir accessible à l’entendement d’une enfant. Et une chimère puérile forgée dans le cerveau immature de dix classes d’âge, où elle reste ancrée durant quatre ans, peut très bien faire, vingt ans plus tard son entrée sur la scène politique, costumée en idéologie délétère » (P. 34)
  • « La génération nazie proprement dite est née entre 1900 et 1910. Ce sont les enfants qui ont vécu la guerre comme un grand jeu sans être le moins du monde perturbés par sa réalité » (P. 36)
  • « Hitler est depuis si longtemps l’objet d’un tel tapage publicitaire concerté, qu’il est devenu à peu près impossible de faire la part entre le charisme et l’imposture » (P. 75)
  • « Rathenau et Hitler sont les deux phénomènes qui ont le plus excité l’imagination des masses allemandes, le premier par son immense culture, le second par son immense vulgarité » (P.79)
  • « Il est difficile de dire où la politique de Rathenau aurait conduit l’Allemagne et l’Europe s’il avait eu le temps de la mener à son terme. On sait que, le temps il ne l’a pas eu, ayant été assassiné après six mois d’exercice » (P. 80)
  • « L’aptitude de mon peuple à la vie privée et au bonheur individuel est plus faible que celle des autres peuples » (P. 110)
  • « Les états majors en temps de paix préparent toujours excellemment leurs troupes à la guerre précédente….il est certain que toutes les familles consciencieuses élèvent toujours excellemment leurs fils en vue de l’époque qui vint de s’écouler  » (P. 156)
  • « On avait cru en Saint Marx, il n’avait pas secouru ses fidèles. Saint Hitler était manifestement plus puissant. Brisons donc les statues de Saint Marx placées sur les autels pour consacrer ceux- ci à Saint Hitler. Apprenons à prier : »C’est la faute au juifs » au lieu de « C’est la faute au capitalisme ». Peut-être est-ce là notre salut. » (P. 202)
  • « Je compris que la révolution nazie avait aboli l’ancienne séparation entre la politique et la vie privée, et qu’il était impossible de la traiter simplement comme un événement politique » (P. 311) 
  • « On aurait évidemment tord de supposer que l’Allemagne et sa culture étaient superbes et florissantes en 1932, et que les nazis ont tout démoli d’un seul coup. L’histoire de l’autodestruction de l’Allemagne du fait de son nationalisme pathologique est plus ancienne,et il vaudrait la peine de la conter. (P. 319
  • « Ce n’était pas seulement sur une défaite que s’achevait la vie de mon père! elle s’achevait sur une catastrophe. Ceux qu’ils voyaient triompher n’étaient pas ses adversaires! C’étaient des barbares qu’il n’avait jamais estimé dignes d’être même ses ennemis. (P. 326)

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