
« Le crime des crimes, dont nous sommes tous par avance convaincus, est d’être né Noir et pauvre »
Tous les jours Rosa Parks prend le bus afin de se rendre au travail, un bus dans lequel les Blancs ont des sièges réservés à l’avant et où les « nègres », comme on les appelle alors, doivent s’entasser au fond et rester debout même si, devant, toutes les places ne sont pas occupées…
Comme ce fut le cas ce 1er décembre 1955 à Montgomery.
James Blake le chauffeur lui interdit de s’asseoir à l’avant du car réservé aux Blancs On ne mélange pas les torchons avec les serviettes…C’est la loi blanche qui le dit. Chacun doit rester à sa place.
Mais il y a Blanc et Blanc…des vrais Blancs de blanc, et des Blancs qui sont le fruit, depuis bien des générations du droit de cuissage des maîtres envers les esclaves.
Ceux-ci restent cependant des nègres pour les Blancs de blanc. II n’y avait qu’en Amérique où on pouvait prendre ces hommes pour des Noirs!
Certains de ces blancs de peau revendiquent fièrement et courageusement leur négritude et leur » état de paria ». D’autres cachent cette tare, heureux que leur apparence leur permette de se placer du bon côté du manche.
Rosa est fatiguée ce jour là, toutes les places réservées aux « nègres » sont prises…Alors elle s’assoit devant, sur un siège de 4 places. Justement là ou un Blanc veut se placer. Il y a tant de places vides à côté, mais non, c’est cette place qu’il veut !
Elle refuse!
Manu-militari, Rosa est embarquée par la police. Son arrestation et son emprisonnement indigneront toute la population noire, qui décidera de boycotter les bus, et de marcher, pour l’égalité des droits.
Le long combat de Rosa commence, un combat qui mobilisera cette population paria et noire. Ce boycott des compagnies de bus durera des mois. Les rares Noirs qui ont des voitures transporteront les autres noirs, le mouvement de contestation sera organisé par un certain pasteur …Martin Luther King.
Un entrepreneur de pompes funèbres proposera ses véhicules.
Le Ku Klux Klan s’en mêlera.
Cette petite goutte d’eau a fait déborder le vase. Il y tant et tant d’autres injustices, qui remontent à la surfaces, des wagons blancs et d’autres Noirs, des places distinctes pour les personnes blanches et celles de couleur dans les restaurants. Les « corps noirs qui se balancent dans la brise du Sud », et ce droit du lynchage font aussi partie du paysage de l’Amérique….
Rosa restera courageuse face aux menaces déposées dans sa boite aux lettres. Les dessins de guenon qu’elle reçut, ne la découragèrent pas.
Le combat dura une année. Il fit perdre beaucoup d’argent aux compagnies de bus.
J’avais quelques années quand tout ceci est arrivé, je ne m’en souviens pas. Depuis, il ne se passe pas une année sans que nous soyons indignés par ces injustices, par des troubles nés de ce racisme qui ensanglantent cet grand pays…
La liste de ces exactions est longue. Même notre actualité récente nous le confirme.
« Rosa est couturière, mais je peux vous dire que c’est un grand homme.» » (P. 284 – Edgar Nixon : militant américain des droits civiques, qui co-organisa le boycott des bus ) »
Merci Monsieur Eugène Ébodé.
Éditeur : Gallimard – Collection Continents noirs – 2013 – 309 pages
Lien vers la présentation d’Eugène Ébodé
Quelques lignes
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« Une loi ne pourra jamais obliger un homme à m’aimer, mais il est important qu’elle lui interdise de me lyncher. » (P. 94)
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« Toutes les stations de cet État, quelle que soit la compagnie de transport, doivent avoir des salles d’attente et des guichets séparés pour les Blancs et pour les personnes de couleur. En ce qui concerne les transports ferroviaires, les conducteurs de trains de voyageurs doivent assigner à chaque passager le wagon ou le compartiment qui lui est destiné selon sa couleur. » (P. 96)
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« Bell estime que la participation des Africains eux-mêmes au commerce des esclaves fut essentielle, tout aussi abominable et, partant, lourdement condamnable. » (P. 143)
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« J’ai souvent parlé à mes proches de la béatitude dans laquelle me plongeaient les paroles de King et notamment le discours qu’il fit à Detroit, plus connu sous le nom de « Cobo Hall speech » ; il annonçait déjà son fameux « I have a dream » du 28 août 1963, devant le Lincoln Memorial de Washington. Wonderboy ! Prenez soin de son message ! On eut peur que ce fantastique orateur ne quitte les rangs de la contestation pour marcher vers le trône du commandement suprême. On eut très peur et, à cause de cela, on arma ferme la main du crime à Memphis. Moi, je ne fus que la modeste attachée d’un parlementaire. Mais, un jour, une femme, noire ou blanche, siégera à la Maison-Blanche. Mais il mettra bien plus long à venir, le jour où un Noir sera gouverneur de l’Alabama. Il faudra attendre le XXIIIe siècle de notre ère !… Ce ne sera pas suffisant, car, ne nous leurrons pas, ce n’est pas de la couleur de la peau que viennent les choix hardis et les actes décisifs en politique ! Ils dépendent de la volonté de l’exécutif et de l’accord du Congrès. Voilà ce que m’a appris mon compagnonnage avec le député Conyers ! » (P. 302-303)
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« On naît de deux ventres : de celui de sa mère et de celui de ses idées. » (P. 306)