
Antoine est l’un de ces gamins mal dans sa peau….
….enfant unique d’un couple divorcé, il n’a qu’un copain, Rémi un gamin de six ans.
Le père d’Antoine est absent et travaille en Allemagne. Antoine adore les animaux, mais sa mère n’en veut pas à la maison. Alors Antoine reporte toute son affection sur Ulysse le chien de M.Desmedt, voisin de la famille.
Il vit un drame, le jour où le chien est renversé par une voiture, et un autre drame quand il voit M. Desmedt tirer une cartouche dans la tête d’Ulysse afin d’abréger ses souffrances…De rage, Antoine va dans la forêt, et casse sa cabane, une cabane qu’il partageait avec son copain Rémi, fils de Monsieur Desmedt.
Rémi ne comprend pas cette rage, cette volonté de tout casser…un coup de bâton porté par Antoine dans la tempe, met Rémi à terre…sans aucun espoir de le voir se relever….
Affolé par son geste, Antoine cache le corps de son copain dans une crevasse du terrain, dissimulée par les branches d’un arbre mort couché à terre. Toutes les battues, tous les appels pour identifier d’éventuels témoins restent vains..il faut se rendre à l’évidence, Rémi a disparu.
Ses parents doivent apprendre à vivre avec ce manque, et Antoine doit grandir avec ce terrible secret…Dans cette « ville étriquée où chacun est observé par celui qu’il observe, dans laquelle l’opinion d’autrui est un poids écrasant », chacun y va de son commentaire.
Antoine ira même jusqu’à envisager le pire pour lui. Le temps passe, Antoine vit sa vie, une vie de succès puisqu’il devient médecin du village, un parti intéressant pour les filles à marier. …mais une vie minée par ce terrible souvenir qui lui impose la prise d’anxiolytiques…
Il est impossible de ne pas faire le rapprochement avec un autre fait divers vosgien jamais élucidé, surtout que ce drame n’est jamais totalement oublié par la population, et reviendra dans les esprits à l’occasion de travaux de viabilisation de terrains à bâtir…
Vous rajoutez une petite dose d’amours crapuleux vite faits…et vous avez un roman qui plonge dans la tête d’un gamin, qui plus tard sera un adulte respecté et malgré tout contraint de vivre et de faire bonne figure dans sa petite ville, dans ses ragots.
À moins que….
Lien vers la présentation de Pierre Lemaitre
Quelques lignes
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« Dans le triangle père absent, mère rigide, copains éloignés, le chien Ulysse occupait évidemment une place centrale. Sa mort et la manière dont elle survint furent pour Antoine un événement particulièrement violent. » (P. 16)
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« Les gendarmes avaient placé des barrières de sécurité empêchant la population d’approcher du bord de l’étang, il fallait laisser travailler les plongeurs. Lorsque Bernadette arriva, soutenue par Mme Courtin et Claudine, le fonctionnaire de service ne sut pas quoi faire. On ne pouvait quand même pas interdire à la mère d’être présente, s’indigna-t-on autour de lui. L’agent était réticent, mais les barrières commençaient à frémir, on entendit quelques cris, une injure fusa, on retrouvait l’état un peu fébrile qui accompagnait cette histoire depuis les premières minutes.. » (P. 77)
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« Elle fréquentait l’église quand elle avait besoin de secours. Dieu était un voisin un peu distant qu’on avait plaisir à croiser et à qui on ne rechignait pas de demander un petit service de temps à autre. Elle allait à la messe de Noël comme on visite une vieille tante. Il entrait aussi dans cet usage utilitaire de la religion une large part de conformisme. » (P. 91)
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« Il encourait une peine de prison de trente ans, diminuée de moitié parce qu’il était mineur au moment des faits, mais quinze ans, c’était toute une vie parce que, après cela, il n’y aurait jamais plus de vie normale, un assassin d’enfant ne redevient jamais quelqu’un de normal parce qu’un assassin de douze ans n’est jamais considéré comme quelqu’un de normal.. » (P. 187-8)
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« …..une ville dont les commerçants sont satisfaits est une ville contente de soi. » (P. 270)
Un presque classique, maintenant ! Joyeuses semaines de fêtes 🎄🎁
Je souhaite en ce début d’année que celle-ci permette, à tous mes amis lecteurs et lectrices , de découvrir et de partager de nombreuses pépites littéraires.
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