
« Il n’y a pas de Blancs innocents, parce que chacun d’eux est un tueur de nègre potentiel, et peut-être un vrai. »
Laitier, est le fils de Macon et Ruth Mort, lui aussi s’appelle pour l’état-civil Macon Mort.
Il a reçu en héritage le nom qui avait été fortuitement donné par le fonctionnaire à l’ancêtre ancien esclave qui venait d’être libéré : « Papa n’avait pas vingt ans et il est allé signer, mais l’homme qui se trouvait derrière le bureau était saoul. Il a demandé à papa où il était né. Papa a répondu Macon. Puis il lui a demandé qui était son père. Papa a dit, « Il est mort. » Il lui a demandé qui était son propriétaire, papa a répondu « Je suis libre. » Le Yankee a tout écrit mais pas au bon endroit. Il l’a fait naître à Dunfrie, sans savoir si ça existait, et dans l’espace pour le nom, cet imbécile a écrit « Mort » virgule « Macon ». Mais comme papa ne savait pas lire, il n’a jamais su comment il était inscrit avant que maman le lui dise. »
Quel manque de considération !
Les prénoms sont depuis, donnés en ouvrant un page au hasard dans la Bible…. ainsi dans la famille, il y a Magdalene , Corinthiens Un, Pilate, la tante.
Macon Mort (père) est une exception, au sein de la communauté noire. Il est l’un des rares à avoir réussi.
Propriétaire de plusieurs logements, il les loue à d’autres noirs, moins bien lotis que lui…..Son père lui a transmis le nom qu’on lui avait attribué lors de l’abolition de l’esclavage…Et depuis toute la famille traine ce nom…ce qui ne rend pas toujours cette lecture aisée..On ne sait pas toujours immédiatement à quel Macon ou à quelle génération nous avons affaire. certains sont riches d’autres beaucoup moins.
Laitier, quant à lui tient son surnom de son goût pour la tétée…il a longtemps tété sa mère.Un projet hante ses rêves : celui de trouver les lingots d’or, un trésor familial qui serait caché dans le sud du pays, où il se rendra. Sa quête va lui permettre en réalité de découvrir les origines de sa famille, de reconstituer une partie de l’arbre généalogique familial, de se confronter à une autre réalité de son pays.
Une quête que tant de Noirs aimeraient entreprendre…cette quête du passé, de la connaissance de ses origines familiales, de son arbre généalogique ….des arbres sans racine faits seulement de quelques branches.
Cette ascendance en grande partie méconnue et tronquée, a quand permis de constituer une ébauche d’arbre qui porte de beaux fruits, et qui ne demande qu’à s’enraciner dans cette terre qui le rejette.
Une lecture exigeante et pas toujours facile, au cours de laquelle, le lecteur est parfois perdu… un beau message d’espoir toutefois
Éditeur Christian Bourgois – Collection 10/18 – Traduction : Jean Guiloineau – 1996 – Parution initiale en 1977 – 472 pages
Lien vers la présentation de Toni Morrison
Quelques lignes
-
« Le Nord était nouveau pour lui et il venait seulement d’apprendre qu’on pouvait adresser la parole à un Blanc. » (P. 17)
-
« « Vous êtes les Noirs les pires et les plus bêtes de la terre. Qu’est-ce qu’ils vous apprennent dans leurs écoles ? On parle comme ça aux cochons et aux moutons quand on veut qu’ils bougent. Si tu dis “salut” à un être humain, il devrait se lever et t’étaler d’un coup de poing. » (P. 59)
-
« Les Blancs aiment vraiment leurs chiens. Ils tuent un nègre et ils se peignent en même temps. Mais j’ai vu des Blancs, des hommes, pleurer sur leurs chiens. » ( P. 80)
-
« Je vais te dire la chose la plus importante que tu auras jamais besoin de savoir : possède des choses. Et que les choses que tu possèdes te permettent d’en posséder d’autres. Tu commences lundi, je vais t’apprendre comment faire. » (P. 84)
-
« Y’a pas de loi pour l’homme noir, sauf celle qui l’envoie sur la chaise électrique. » (P. 122)
-
« Au Congo, un Français touchera jamais à un œuf brun.– Pourquoi ?– Il en a peur. Ça pourrait faire quelque chose à sa peau. Comme le soleil.– Les Français, ils aiment le soleil. Ils essaient toujours de prendre des bains de soleil. Sur la Côte d’Azur…– Ils essaient de prendre le soleil français, mais pas le soleil du Congo. Au Congo, ils détestent le soleil.– Enfin, j’ai bien le droit d’être ce que je veux, et je veux être un œuf.– Sur le plat ?– Sur le plat.– Alors il faut que quelqu’un casse ta coquille. » » (P. 168)
-
« Qu’est-ce que vaut la vie d’un homme s’il peut même pas choisir pour quoi mourir ? » (P. 399)