« Dialogue avec la mort – Un testament espagnol » – Arthur Koestler

un-testament-espagnolArthur Koestler avait infiltré les troupes franquistes afin de confirmer à l’opinion publique l’intervention allemande et italienne dans cette guerre civile des franquistes contre le pouvoir républicain en place légalement élu. Il est arrêté le 9 février 1937 dans la maison de Sir Peters le consul anglais et condamné à mort, sans jamais comparaître devant un tribunal.
Transporté à Seville, il recevra en prison la visite de journalistes qui l’informeront que des actions internationales ont été engagées directement auprès du Général Franco, afin qu’il soit libéré…En vain.

Il restera emprisonné jusqu’en mai 1937 très longtemps seul, sans aucun contact avec d’autres prisonniers et tous les jours ou presque verra passer devant sa cellule la longue file des condamnés partant vers le peloton d’exécution au petit matin. 
Arthur Koestler nous livre dans les premières pages un témoignage-reportage sur la guerre civile espagnole, et par la suite ses angoisses, ses peurs de condamné à mort, pouvant être exécuté d’un matin à l’autre. Angoisses chaque fois que sa porte s’ouvre : le gardien lui met des menottes : c’est bon signe…c’est parce qu’il est transféré de sa cellule à un bureau ….pourvu que ce ne soient pas une ficelle-lien…réservée au dernier voyage. Angoisses de chaque nuit à l’écoute des pas dans les couloirs. Résistance du condamné  : grèves de la faim, simulacres de crises cardiaques afin d’être transféré vers l’infirmerie.« L’attente est toujours une torture ; l’attente sans espoir, la pire de toutes. »
Il sera finalement libéré en échange d’un autre prisonnier, sans doute à la suite d’une intervention de Franco.
J’aimerais maintenant trouver et lire « Réflexions sur la peine Capitale » dont il fut le Co-auteur avec Albert Camus..un livre qui ne figure plus dans la liste des ouvrages de ma médiathèque…
Peut-être parce que ce n’est plus un problème d’actualité, ici oui….mais ailleurs? 

Un texte fort dont je me souviendrai


Arthur Koestler


Quelques extraits
  • « Barcelone offrait un spectacle déprimant, Ni pain, ni lait, ni viande et de longues queues devant les boutiques. Les anarchistes rendaient responsable le gouvernement catalan de la pénurie de vivres et organisaient une campagne intensive d’agitation politique ; les vitres des trams étaient couvertes de leur tracts. La tension en ville approchait du point critique. L’Espagne, semblait-il était le théâtre non seulement d’une répétition générale de la Seconde Guerre mondiale, amis aussi d’un combat fratricide au sein de la gauche européenne. » (P. 26)
  • « Avant de donner un coup de fil, il fallait envoyer au censeur la copie du texte qu’on allait dicter et, pendant que vous téléphoniez de votre hôtel, le censeur écoutait, assis dans son bureau, la copie devant lui. Le censure était sévère, mais les censeurs eux-mêmes de braves types que nous connaissions tous personnellement. » (P. 28)
  • « Il y a une bonne dose de fatalisme oriental dans la manière espagnole de mener une guerre, et cela des deux côtés ; c’est pourquoi elle semble, à la fois et en même temps, si improvisée au petit bonheur, si cruelle, et d’une épique incohérence. Les autres guerres sont une succession de batailles ; celle-ci est une suite de tragédies. » (P. 37)
  • « Quant à moi, certaines aventures à Séville [….] ont conduit les autorités rebelles à lancer un mandat d’arrêt contre moi et le livre que je vins de faire paraître à Paris ne me rend certes pas plus populaire auprès des généraux Franco et Queipod de Llano. » (P. 61)
  • « Ce que j’ignorais, c’est que la cour martiale de Malaga avait déjà prononcé ma condamnation à mort sans m’avoir auparavant cité à comparaître. La seconde chose que je ne savais pas, c’était qu’à ce jour – samedi 13 février 1937 – cinq mille hommes avaient été exécutés à Malaga depuis la chute de la ville ; dont six cents pour ma seule prison. » (P. 110)
  • « Une civilisation trahit sa pourriture par de curieux symptômes ; dans le fait, par exemple que les murs de pierre des prisons ne servent plus à défendre la société contre le prisonnier, mais à mettre le prisonnier à l’abri de la société. » (P. 125)
  • « Je commence maintenant à découvrir peu à peu ce qu’est la mentalité de l’esclave. Je souhaiterais que tous ceux qui parlent de la psychologie des masses puissent faire l’expérience d’une année de prison. Je n’ai jamais cru l’adage selon lequel une dictature, une seule personne ou une minorité pouvait maintenir leur pouvoir par la seule loi des armes. Mais j’ignorais à quel point sont réelles et vivantes ces forces ataviques qui paralysent la majorité de l’intérieur. Je ne savais pas combien on en vient vite à considérer une catégorie privilégiée d’hommes comme des êtres d’un espèce biologique supérieure, et à tenir leurs privilèges pour naturels comme si c’était des dons innés. » (P. 177)
  • « Dans la nuit de lundi, on en fusilla dix-sept 
    Huit la nuit de jeudi
    Neuf, la nuit de vendredi
    Treize, la nuit de samedi. 
    « Tu travailleras six jours à dit le Seigneur » et le septième, le jour du Sabbat, tu ne feras aucun travail d’aucune sorte.
    Dans la nuit de dimanche, on en fusilla trois. (P. 216)
  • Il a pourtant vécu les mêmes expériences nocturnes que moi, et quels moments a-t-il dû passer pendant les premiers mois, quand cent, deux cents, trois cents condamnés étaient menés au poteau chaque nuit, sans jugement à l’époque, ni aucune sorte de formalité…?  » (P 223)
  • « Si vous signez une déclaration selon laquelle vous ne vous mêlerez pas des affaires intérieures de l’Espagne, je pourrai alors prendre certaines mesures pour obtenir votre libération. Mais nous n’allons pu vous y obliger, nous sommes des caballeros. » (P. 253)

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