
Il prend plaisir à creuser un trou dans la glace qui recouvre la mer, et à s’y plonger chaque jour. Une pièce de sa maison est envahie par les fourmis qui ont construit leur nid, un nid dont il surveille chaque jours la croissance. Seul un facteur hypocondriaque vient le voir de temps en temps, un facteur qui lit les courriers…
Mais un jour surgit dans l’immensité blanche, la silhouette d’une vieille femme marchant lentement sur la glace aidée d’un déambulateur.
La vieille femme est Harriet, une de ses conquêtes féminines de jeunesse qu’il a lâchement abandonnée. Atteinte d’un cancer en phase terminale elle vient lui demander de respecter une promesse qu’il lui avait faite.
Cadre pas banal d’un roman, d’un grand bonheur de lecture !
Sa solitude de vie en sera bousculée, ses fantômes de jeunesse lui reviennent à l’esprit, ses erreurs et fautes passées aussi…c’est à cause de ces erreurs et de ces fautes qu’il vit reclus, des erreurs et des fautes qui hantent son esprit et qu’on découvrira progressivement.
Il est le fil conducteur d’un roman très féminin, d’un roman dans lequel LA FEMME, est mise à l’honneur : quatre femmes fortes et toutes admirables, à des degrés divers, qu’il va rencontrer et dont il va pour quelques jours partager la vie, leur expérience de vie. Quatre femmes dont Harriet qui vont le sortir de sa léthargie et lui démontrer que la vraie vie ne se trouve pas dans l’isolement, dans la solitude et dans la fuite de ses responsabilités, mais au contraire dans l’engagement personnel au profit d’une cause ou des autres, dans le pardon des erreurs commises, dans la lutte acharnée contre la maladie.
On ne peut bien vivre que si on s’ouvre au monde
Ces seconds rôles donnent toute la vie à ce roman et ballottent notre héros principal. Leurs conversations, leurs remarques sur l’amour, la vie, la mort, la solitude, la maladie, ballottent aussi le lecteur.
J’ai été remué par ces personnages, sans doute parce que je me suis retrouvé dans certaines situations, certaines rencontres, certaines parties de la vie de ces cinq personnages…
Mais quel bonheur !
Qui est Henning Mankell
Quelques lignes
« Les vieux à notre époque doivent être transparents comme du verre. On leur demande de se rendre invisibles. » (P. 141)
« Il est aussi facile de se perdre à l’intérieur de soi que sur les chemins des bois ou dans les rues des villes. » (P. 156)
« J’ai un cancer et pas assez de temps devant moi pour le perdre à paniquer pour rien dans un hôpital. » (P. 181)
« – Nous faisons tant de mal à nos enfants qu’à la fin ils n’ont plus d’autre moyen d’expression que la violence. Dans le temps, c’était réservé aux garçons. Aujourd’hui, nous avons des gangs de filles qui n’hésitent pas à employer des méthodes qui font vraiment froid dans le dos. C’est la plus grande des défaites. Que des filles soient amenées, par désespoir, à croire que leur salut consiste à se comporter comme les pires des garçons qu’elles connaissent. » (P. 210)
« C’est impossible de voir sur le visage de quelqu’un à quel point il ou elle est abîmé à l’intérieur. » (P. 259)
« Il faut faire le ménage dans sa vie avant de mourir. » (P.328)
« Je ne crois pas qu’on doive tout partager. Si on fouille trop loin dans le cœur des autres, on risque de détruire l’amitié. » (P. 365)