« Des hommes couleur de ciel » – Anaïs Llobet

Un attentat dans le lycée de La Haye ou étudie Oumar Akhmaïev, jeune lycéen d’origine Tchétchène, fait 20 morts.

La police, les politiques, dont le premier ministre, les personnalités arrivent et tout accuse les jeunes d’origine Tchétchènes étudiant dans le lycée, dont Oumar. 

Cet attentat était conçu pour tuer, tuer le plus possible de gamins… : Il a été commis dans le réfectoire au moment ou les gamins déjeunaient.

Oumar est arrêté, et pourtant il n’a pas le profil d’un terroriste : il porte un jean bien trop moulantà 200 €, un tee-shirt violet presque rose, et du fond de teint couvre son visage….la tenue qu’il porte lorsqu’il écume les boites de nuit en se faisant appeler Adam.

Oui, Oumar est homosexuel… »crime » puni de mort en Tchétchénie.

Alissa, la professeur de russe, également d’origine tchétchène devient interprète et traduit les interrogatoires de Oumar, que tout accuse. Si ce n’est lui c’est Kirem, son frère qui a disparu. 

Adam/ Oumar cache à ses proches ses désirs, sa vie cachée…il sait ce qu’il risque, surtout si son frère découvre le fond de sa personnalité….deux frères aux comportements totalement différents, l’un est parfaitement intégré et ouvert aux autres, l’autre est violent, renfermé, difficile à cerner, et à apprécier. 

Le roman sert de prétexte à l’auteure pour aborder plusieurs thématiques, parmi lesquelles l’exil, la confrontation des cultures, la tolérance et l’intégration, les discriminations. 

Intégration à plusieurs niveaux, depuis l’enseignante qui souhaite cacher ses origines à ses élèves, en passant par ceux qui ont émigré vers l’Occident sans jamais abandonner leur religion, leurs traditions, les codes d’honneur dans lesquels ils ont été élevés et qui s’élèvent contre cet Occident qui autorise toutes les « déviances », et permet aux mécréants de tout poil de s’exprimer, de réprimer et de vivre sans contrainte. 

Oui être homme bleu, être « stigal basakh vol nakh » être « un homme couleur de ciel« , peut être une condamnation à mort y compris sous nos cieux.

Une thématique qui, ne concerne pas seulement les personnes d’origine tchétchène.

Malheureusement.

« On ne peut pas entrer dans une nouvelle maison tout en gardant un pied dans l’autre. Les portes laissées ouvertes suscitent des courants d’air. Et personne n’aime les courants d’air. » (P. 41) 

Les Éditions de l’Observatoire – 2019 – 209 pages


Lien vers la présentation d’Anaïs Llobet


Quelques lignes

  • « Alissa sentait confusément que l’emphase donnée aux mots les vidait de sens. Une société « tolérante, bienveillante, ouverte » n’avait pas besoin qu’on le lui dise pour s’en souvenir. Et brandir ses valeurs comme un bouclier de dentelle face à des bombes aveugles lui parut absurde : vingt enfants avaient été tués, la haine était légitime. » (P. 28)
  • « Adam est Oumar, mais Adam ne ressemble pas à Oumar. Oumar est ponctuel, Adam est toujours en retard de vingt minutes à ses rendez-vous. Oumar a un accent tchétchène, Adam un accent jordanien. Oumar a de grandes mains sèches, Adam de longs doigts féminins. Oumar est pudique, Adam éclate d’un rire gourmand, presque sauvage, lorsqu’il emmène ses amants dans les toilettes d’un bar. Il lui faut du tumulte, du tapage, des embrassades et des saluts, il aime chahuter, provoquer, courir dans la rue pour suivre un inconnu, s’absenter un instant et revenir danser l’air de rien. » (P. 119)
  • « Un Tchétchéne homosexuel doit vivre caché ou mourir. » (P. 199)

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