
« L’amour et la haine sont un voile devant les yeux : l’une ne laisse voir que le bien, l’autre que le mal. »
Ce proverbe algérien résume en quelques mots, ce livre, ces contradictions, cette haine à mort qui anime et oppose les algériens entre eux….tout ça au nom d’une religion de paix pour certains, de mort pour d’autres, ou plutôt au nom d’interprétations de textes religieux.
Amour et haine sont les moteurs de ce livre, amour qui unie certaines familles et haines qui poussent certains vers le crime.
Tout ça au nom de principes, au nom de la religion….
Ou plutôt au nom de l’interprétation de textes religieux faite par certains…
Kabira Beniz m’avait dérangé avec « Le voile de la mariée« , avec l’histoire de cette gamine mariée de force par son père et répudiée dans la foulée par son mari impuissant…..Comment refuser, alors, de mieux la connaître avec ce nouveau titre.
Dans tous les cas, je savais qu’elle me dérangerait, c’est ce que j’attends de la lecture…..une claque sans aucune mièvrerie. Je ne fus pas déçu !
L’émotion et l’Indignation, avec un grand « I » animèrent cette nouvelle rencontre avec Kabira Beniz et avec cette petite maison d’édition « Le chant des voyelles« que j’ai eu le plaisir de connaître et d’apprécier il y a quelques années.
Impossible de rester indifférent, de ne pas être bousculé par ces tensions, par ces conversations, par cette haine qui divise ce peuple. Haine qui va même se nicher au sein de fratries…..au nom d’interprétations par certains de textes religieux, au nom de l’Islam qui dicte au nom de ces interprétation le mode de vie de certains.
Islam, religion de paix et d’amour pour certains, pousse aux crimes pour d’autres…bien trop nombreux.
Ce peuple algérien, ces familles, ces fratries se déchirent au nom de cette religion.
Au nom du sexe aussi….femmes sans aucun droit pour certains hommes, et donc femmes rejetées et répudiées par ces hommes ayant tout pouvoir sur elles, y compris et surtout quand il faut masquer l’impuissance d’une nuit ou définitive du fait de leurs cheveux blancs
Roman d’une femme élevée dans cette religion, roman pointant du doigt, toutes ces contradictions, toutes ces attitudes de rejet de ces femmes, tous ces crimes commis au nom de cet Islam.
Tout ça, on le sait, l’actualité nous le rappelle, trop souvent, mais ce regard féminin sur cette Algérie et sur cette religion est important. D’abord parce que ces femmes n’ont souvent aux yeux de certains, pas droit à la parole.
« Quand le zob n’est pas à la hauteur, l’homme ne tarde pas à accuser le trou, » (P. 166)
Et ainsi parce qu’il témoigne du courage d’une femme, musulmane.
C’est pourquoi il mérite d’être connu, et mis en avant.
Merci aux Éditions « Le chant des voyelles » de porter ces voix et ces messages de femmes contraintes au silence.
Quelques lignes
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« Des jeunes gens vigoureux à qui un bel avenir semblait promis abandonnaient leurs études de façon inexpliquée et restaient à la maison sans rien faire, parfaitement inutiles à la société. Pire encore, d’autres sombraient dans la délinquance. » (P. 19)
- « Comment exposer sa féminité dans la cité, sans fards et sans manières ? La voie est étroite entre se cacher et s’exhiber pour la femme arabe, condamnée à traiter son corps comme un cadeau empoisonné. » (P. 23)
- « Les textes sacrés, c’est des modes d’emploi pour être un bon croyant. Le problème c’est qu’on n’y comprend rien. Du coup les baratineurs n’ont pas fini de nous rouler dans la farine. » (P. 63)
- « Nous sommes l’armée de Dieu, nous sommes ses messagers, il nous a confié la mission de purifier cette terre des mécréants qui ont choisi d’instaurer leur propre loi au mépris de la charia. Nous sommes les chevaliers de l’Islam, et nous sommes impatients de mourir pour Dieu puisque cela est sa volonté. Allah Akbar » (P. 99-100)
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« La place de ses épouses se jouait dans cette combinaison subtile de rôles, tantôt servantes, tantôt courtisanes. Elles acceptaient tout de lui, son pain et ses colères, son miel et son fiel, sa protection et ses appétits. Elles devaient obéir à leur époux en tous points, mais aussi se soumettre à ses caprices versatiles et à son bon plaisir, de jour comme de nuit. » (P. 188)
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« Le sexe était ainsi une affaire de domination et d’avilissement. » (P. 189)